PSEUDO-CONSULTATION SUR LES NOUVEAUX PROGRAMMES DES CYCLES 1 ET 2
Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse – 30 avril 2024
COMPTE-RENDU
Pas de présentation très claire des participant·es à la réunion côté administration : IGEN (2 en Français et 2 en mathématiques qui ont participé à la rédaction de ces projets de programme), DGESCO dont chef et adjoint au chef du bureau des écoles, chargé·es d’études au MENJ…
Identifiés en cours de réunion :
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Matthieu Lahaye, sous-directeur des savoirs fondamentaux et des parcours scolaires au sein du service de l’instruction publique et de l’action pédagogique à la Dgesco
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Laurent Bergez, Bureau des contenus pédagogique et des langues
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Catherine MOTTET, IGEN français
Toutes les organisations syndicales représentatives, sauf FO.
- Est présente aussi une commission non identifiée. Le SPELC, Syndicat de l’enseignement privé.
En introduction, l’administration rappelle le cadre serré de cette consultation (1h30 d’échanges) ; tout ce qui ne pourra être dit aujourd’hui pourra être transmis Au PLUS TARD LE 13 MAI par courriel.
Rappel de la démarche :
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questionnaire en ligne
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consultation des corps d’inspection
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OS ce matin
Pour le français
Les IGEN français rappellent qu’iels ont fondé la rédaction de ces nouveaux programmes à partir du cadre de la lettre de saisine de janvier dernier et de la note d’intention de février. Iels se sont appuyé·es sur un groupe d’experts, des auditions et les recommandations données depuis 2017.
Le programme pour la maternelle se présente en trois parties :
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Acquérir le langage oral, enrichir le lexique, développer la syntaxe, concevoir un propos clair pour être compris
Les deux suivantes doivent préparer aux apprentissages fondamentaux de l’école élémentaire : lecture et écriture :
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Se préparer à apprendre à lire
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Se préparer à apprendre à écrire
Le programme est progressif, par tranche d’âge.
- Les objectifs sont quantitatifs (cadences, rythmes…) : on vise la régularité, ma récurrences, avec des temps définis. Sont également données des indications sur les gestes et la posture.
- L’enseignement doit être structuré et explicite.
- Si dans sa lecture des programmes, on ne perçoit pas leur sens pour les élèves de maternelle, leur fonction, il faut se dire que c’est normal : pour l’instant, on s’est attelé au français et aux mathématiques mais tout le reste va être progressivement réécrit.
- En élémentaire, on rappelle la place absolument centrale de la lecture, c’est pourquoi elle est volontairement placée avant l’oral. Grammaire et orthographe sont dissociées du vocabulaire, volontairement aussi, parce qu’il semblait nécessaire de focaliser sur le vocabulaire.
- On retire le carcan horaire (non précisé), remplacé par des indications sur ce qui doit être enseigné chaque jour, chaque semaine…
- L’accent est mis sur la culture générale, avec un point de vigilance sur les auteurs patrimoniaux. Cette construction de la culture commune est quasiment absente dans les REP.
- Ce programme se base sur les guides parus depuis 2017 (orange, rouge…).
Pour les mathématiques
- Il y a peu de nouveauté, sauf dans la présentation [et la répartition annuelle, non ?] : présentation en deux colonnes (« objectifs » à gauche et situations qui doivent être mises en œuvre à droite).
- Il y a une volonté forte d’un apprentissage très progressif de la construction du nombre.
- C’était une demande du terrain d’avoir des programmes explicites, détaillés.
SNUIPP
- Étonnement et mécontentement, sur la méthode, la consultation [à deux reprises dans la matinée, le SNUIPP interviendra pour rappeler que ce ne sont pas aux parents de faire les programmes, mais à celles et ceux qui en ont l’expertise], sur la présentation, du document mélangeant programmes et documents d’application, sur la précocité des apprentissages, génératrice d’échec.
- Le programme de C2 envisage davantage la langue comme une outil à travailler qu’un langage servant à traduire la pensée.
- Sur la fluence : aucune recherche ne prouve une corrélation entre la rapidité à lire des mots oralement et la compréhension d’un texte.
- Ces programmes privilégient des mécanismes au détriment du sens.
- Le SNUIPP note des notions déconnectées de la réalité du CE1.
UNSA
- Critique de la forme, de la durée de cet échange
- Ce « programme » n’en n’est pas un ! Il ne s’agit que d’un « kit pour contractuel·les ».
- Alors qu’on va de plus en plus loin dans l’inclusion, les textes de cadrage sont de plus en plus pauvres.
- Ils sont binaires : l’élève sait, connait ou ne sait pas, ne connait pas. Or la clef n’est pas dans les contenus mais dans les conditions d’apprentissage.
- Quel cout vont représenter ces programmes, pour des collectivités qui n’y arrivent pas, dans des départements ultramarins par exemple ? Ou dans des écoles de métropole qui n’ont même pas de BCD digne de ce nom ?
- Comment le ministère prévoit-il que les personnels s’approprient ces nouveaux programmes ?
CFDT
- Dénonce le timing de cette sortie précipitée alors que le socle commun doit être réécrit.
- La fluence n’est pas la fin en soi de la lecture.
- On n’a l’impression qu’on a écrit des programmes pour bachoter les évaluations nationales et internationales.
- Ils sont trop prescriptifs, méconnaissent ce qu’est un enfant. La réalité d’une classe n’est pas celle d’une tranche d’âge : chaque élève a une maturité qui lui est propre, surtout en maternelle. Ces différences sont amplifiées pour les élèves en sCes projets ne sont pas acceptables : « il faut redonner aux enseignant·es l’ingénierie de leur métier ».
CGT Éduc’action
Si la CGT Éduc’action est une organisation syndicale professionnelle dont la principale préoccupation est la défense des personnels de l’Éducation, elle milite aussi pour l’amélioration des conditions d’apprentissage et d’émancipation des élèves, et cela concerne aussi les programmes.
Autant dire que ce qui nous est proposé par le gouvernement, son Premier Ministre, et le ministère de l’Éducation Nationale et de la Jeunesse et le CSP, ne nous satisfait :
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ni dans la méthode : une exclusion pleine et entière des organisations syndicales des travaux du CSP et une consultation en ligne ouverte à tous vents, individuelle, sans temps d’échanges prévus avec les personnels, sans dégager le temps indispensable à une réelle réflexion, aux échanges, à la formulation de propositions…
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ni dans le calendrier : avec une parution des projets pendant les vacances de deux zones, sans communication directe faite aux organisations syndicales, une date limite fixée au 13 mai avec une zone qui reprendra l’école le 6 mai, et avec un pont de cinq jours…
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ni sur le fond : un projet qui prend sa source dans une analyse erronée des résultats PISA de la part du désormais premier ministre et l’instauration de son Choc des savoirs unanimement contesté par les personnels et les organisations syndicales… Un projet qui satisfait les bas instincts d’une droite extrême, rétrograde, idolâtre d’un passé où l’École ne scolarisait plus, dès la fin du primaire, une grande partie des élèves, où une minorité atteignait le lycée, encore moins l’enseignement supérieur. Ce projet fait fi d’une très grande partie de la recherche pédagogique tout en misant sur les uniques neuroscientistes et le Conseil scientifique de l’Éducation nationale, des constats de ce qui fonctionne dans d’autres pays européens où les enfants entrent plus tardivement dans les apprentissages cognitifs et des bonnes idées de certains précédents programmes pourtant largement appréciés et défendus par la communauté éducative. Il élémentarise l’école maternelle déjà mise à mal depuis 7 ans alors que de nombreux pays nous l’enviaient. Il n’envisage l’enfant-élève que comme un modèle établi par les neurosciences, sans le considérer dans sa globalité affective, sociale. À l’image du gouvernement, il mésestime voire méprise la jeunesse.
Face à un tel projet que nous contestons et comme pour la labellisation des manuels, nous ne rentrerons pas dans le détail de ces programmes prescriptifs comme jamais auparavant et qui entrent dans votre projet global pour – ou plutôt contre – l’École. Nous vous l’avons dit à de nombreuses reprises, en instances et en entretiens. Il n’est bon ni pour les personnels qu’il dénigre et rabaisse au rôle de simples exécutant·es, ni pour l’École et ses usagères et usagers, ni pour la société.
Ce projet est bel et bien dangereux pour la professionnalité, le respect des compétences des enseignant·es et leur liberté pédagogique. Ces nouveaux programmes sont un des outils pour la mise au pas pédagogique et idéologique des enseignant·es en les transformant en uniques technicien·nes de l’enseignement devant appliquer, sans discernement ni construction propre, des méthodes pédagogiques dispensées uniformément à n’importe quel·le élève de n’importe quel lieu ou n’importe quelle construction sociale. C’est la négation de ce qu’est enseigner et une caporalisation des personnels.
Rappelons que les ministres n’ont eu de cesse que de vouloir apposer leur signature en bas de programmes pour le premier degré, comme un testament politique de leur passage : 2002, 2007, 2015, 2017, avec des « ajustements » presque chaque année depuis : 2020, 2021-22, 2024 !
Comment voulez-vous dans ces conditions que les personnels s’y retrouvent ? Votre labellisation des manuels – qui précède la mise en place de ces programmes, encore un télescopage de calendrier – est une injure au monde de l’Éducation. Ces nouveaux programmes vont aboutir à encore moins disposer d’outils adaptés. Alors que l’école se fissure de partout, au sens propre comme au sens figuré, notamment à cause du manque de moyens humains et matériels, l’urgence n’est pas là.
À la CGT Éduc’action, le projet que nous voulons est celui d’une École de l’émancipation, qui promeut des valeurs qui devraient présider dans la société : la coopération, la solidarité, l’égalité des droits. Ses programmes doivent donc être le fruit d’une large concertation, donner du sens aux apprentissages, garantir la liberté pédagogique des enseignant·es. Ils doivent offrir à tou·tes les élèves une formation la plus complète possible en sortant du « tout-fondamentaux » qui est un leurre pour la réussite des élèves. Une fois ces programmes établis, ils doivent faire l’objet d’une véritable formation – à ne pas confondre avec « information » – des enseignant·es (laquelle doit se dérouler sur temps scolaire) tout en leur donnant le temps de se les approprier (et pas seulement quelques semaines sur la pause estivale).
Vous l‘avez compris, la CGT Éducation est opposée à ces programmes, ou du moins ces mises à jour… Elle demande que cesse la politique d’éducation globale menée par le gouvernement, faite de démagogie et de contrôle, du tout-évaluation et de positions rétrogrades et clivantes.
SNALC
- D’accord sur ce qui a été dit sur le cadre et la méthode. La profession ne demandait pas de nouveaux programmes !
- Le SNALC salue une présentation plus claire et plus précise, des programmes détaillés, mais les rédacteurs sont tombés dans un écueil : le dirigisme.
- Il se dit « inquiet » des « points de vigilance » qui doivent être réécrits dans des documents d’application, pas figurer dans un programme.
- Il est favorable à des repères annuels.
- Enfin, il reproche que français, maths et EMC prennent le pas sur l’apprentissage d’une culture commune.
SUD
- Idem sur la consultation. On a besoin de temps dédié pour les organisations syndicales, les personnels dans les écoles.
- SUD dénonce l’inflation du volume des programmes, leur prolixité (100 pages de la PS au CE2 en mathématiques).
- Comment fera-t-on pour les élèves qui seront en difficulté avec des objectifs par période ?
- SUD critique l’élémentarisation de la maternelle, avoir le choix des entêtes « français » et « mathématiques ». C’est une école maltraitante.
- Il y a une inflation d’injonctions. Ce projet est élitiste, il ne tient pas compte de la diversité des élèves. Or il y a un réel danger à ne pas prendre en compte les besoins « autres ».
- Sud regrette l’introduction précoce des nombres décimaux au cycle 2 : il y a une vraie inquiétude dans la mise en œuvre de ce programme.
- Que va-t-il se passer pour les élèves qui n’auraient pas les acquis exigés en fin d’année ? Redoublement ? Tri social !
- Il y une mise au pas de la profession qui exprime des besoins, mais pas celui de changer les programmes !
Commission non identifiée
- Le délai est trop court, il y a manque de concertation ce qui suscite l’inquiétude des collègues. Quels sont les fondements de la recherche (en psychologie, en pédagogie…) pour l’élaboration de ces programmes ? Quelles sont les sources utilisées ?
- Impossible de mettre en place ces programmes dès septembre. Il ne faut pas s’étonner ensuite que le métier d’enseignant n’attire plus. Cette succession de programmes y contribue.
- Cette réunion est trop courte, trop tardive. Pourquoi consulter les parents alors qu’il n’y a pas eu de consultation, de concertation avec les experts de terrain ?
- Il y a infantilisation des personnels, avec ces programmes orientés sur le contrôle, l’évaluation.
- Quelle place pour les élèves à BEP ?
- Il faut prendre en compte les paramètres sociaux.
- Points positifs : des programmes clairs et structurés, le sens de la fraction dès le CP.
- Mais il était demandé d’alléger les programmes, on voit plutôt des ajouts. Seule suppression notable : celle de 4 verbes irréguliers dans la conjugaison du présent de l’indicatif au cycle 2.
Retour du MENJ
- L’Administration, dans sa réponse, se retranche derrière « les modalités habituelles » pour une consultation de cet ordre. L’administration prendre le temps de l’analyse des retours que lui feront les OS jusqu’au 13mai et une marge de manœuvre existe.
- Il est également « habituel de consulter les familles ». [les représentant·es des fédérations de parents d’élèves, oui, peut-être, mais pas ouvrir la consultation individuelle à tou·tes.]
- Aucun programme n’entame la liberté pédagogique des enseignant·es.
CGT Éduc’action
- Si, la liberté pédagogique est concernée ! Si la liberté pédagogique s’exerce dans le cadre des programmes, ceux-ci posent problèmes parce qu’ils incluent des éléments qui ne relèvent pas des programmes.
Laurent Bergez
Ces programmes garantissent l’égalité des élèves. Les cadres territoriaux [les IEN ?] vont aller dans les écoles voir les directeurs d’école pour leur expliquer l’intention de ce programme. Il n’y a pas de rupture. Ils vont être appréhendables facilement par les enseignants.
IGEN
- Iels insistent sur la nécessaire articulation du vocabulaire avec la syntaxe : c’est une priorité.
- On prépare les élèves de maternelle à la lecture, on n’anticipe pas l’élémentaire. C’était le cadre fixé de réécriture des programmes.
– C’est donc la fin des cycles ?
IGEN mathématiques
- Il est inutile d’imposer des révisions aux élèves qui n’en ont pas besoin, c’est une perte de temps pour eux. Il faut sortir de ces longues semaines de « révisions » au début de chaque année scolaire. Les notions du programme doivent se dérouler.
IGEN français
Pour ce qui est des sources, elles sont indiquées dans les guides déjà publiés ; exemples : J. Ziegler et L. Sprenger-Charolles [Liliane Sprenger-Charolles (FIN) (Exclusif) ; http://www.touteduc.fr/fr/scolaire/id-16360–apprendre-a-lire-la-reponse-de-liliane-sprenger-charolles-au-4-pages-exclusif-] en français [les deux exemples cités sont membres du CSEN avec S. Dehaene à sa tête].
SNUIPP
- De nombreux autres chercheuses et chercheurs ont un regard très critique sur les conclusions de leurs travaux.
- Par ailleurs, quid de la durée du cycle qui laisse à l’élève le temps d’apprendre ?
IGEN français
- La différenciation est insuffisante dans les classes. On refait tout à chaque début d’année, alors que certains élèves ont déjà des acquis. Il faut arrêter.
SNUIPP
- Nous sommes inquiet sur le redoublement, l’invisibilisation des cycles.
- Les directrices et les directeurs n’ont pas vocation à transmettre ce type de justifications.
Administration
- Comme nous vous l’avons déjà dit, il n’y a pas vraiment de changement. On s’appuie sur les guides déjà produits.
CGT Éduc’action
- Si on est dans un continuum, pourquoi une telle urgence ? Commençons par une large concertation, une consultation du terrain, et la mise en place d’une vraie formation.
- Contrairement à ce qui a été dit tout à l’heure, d’autres formes bien plus adaptées de consultation ont déjà été mises en œuvre, pour les programmes de 2002 par exemple.
CFDT
- Le directeur n’est pas un prescripteur pédagogique pour ses collègues.
- Notons qu’en Finlande et en Estonie, qui obtiennent de très bons résultats, il n’existe pas de programme pour l’école maternelle.
Administration
- Ce ne sont pas de bons exemples. Dans ces pays, il n’y a peut-être pas de programme national, mais c’est le maire ou la collectivité qui le fixe. C’est ce que vous voulez ?
- Les OS ont souvent déploré le manque d’harmonisation entre programme et guides. Ce projet corrige ce manque.
- Le calendrier est contraint mais ce qui est mentionné là est déjà appliqué dans de nombreux endroits ; les formations en constellation, les plans lecture et mathématiques ont contribué à répandre ces principes.
UNSA
- Elle déplore le focus sur les fondamentaux. Quid de la transversalité ? Dans ces programmes, tout repose sur l’enseignante alors qu’un enfant apprend aussi par d’autres voies : avec ses pairs…
Administration
- C’est au maitre de piloter sa classe.
Laurent Bergez
- On va clore maintenant [il est presque 11h00]. Pour vos contributions à venir, merci de les porter s’il vous plait directement sur le projet de programme.
SUD
- Quelle garantie avons-nous qu’elles seront prises en compte ?
Administration
- On les lira avec soin et des améliorations sont encore possibles.