Lettre ouverte
de Nicole Hénault retraitée de l’EN
Monsieur le Président,
Votre dernière allocution m’a plongée dans une profonde colère, et ceci pour trois motifs principaux.
Tout d’abord, à cause de cette prescription tardive, avec effet quasi immédiat, d’un confinement qui conduit un grand nombre de personnes à un chamboulement rapide de tous les engagements pris, qu’ils soient professionnels, personnels, familiaux…pour les quatre semaines à venir :
Je pense à tous ceux qui ne vont plus pouvoir travailler, certains commerces, ou qui continuent à ne pas pouvoir travailler, les personnels de la culture…
Je pense aux familles qui avaient posé des congés pour être avec leurs enfants et se retrouvent en difficulté pour la garde des enfants.
Je pense aux écoliers, collégiens, lycéens, étudiants qui se retrouvent encore à changer de rythme pour la énième fois, au pied levé.
Je pense à tous ceux qui vont devoir tout réorganiser en conséquence, patrons, salariés, enseignants, chefs d’établissement scolaire…
Je pense à ceux qui vont devoir subir des changements non négociés, non négociables, parce que le monde de l’entreprise, de l’administration, ce n’est pas toujours un monde de la participation collective et empathique, aux décisions …
Ensuite, ma colère trouve son origine dans le fait que tout en faisant appel à la responsabilité et à la solidarité de chacun, dans cette nouvelle épreuve du confinement, sans évoquer précisément ce « chacun », vous trouvez le moyen de trouver des mots pour rassurer les quelques-uns qui souhaiteront aller à la campagne pour les quatre semaines de confinement, « pour s’isoler ».
Quand des millions de personnes se retrouvent en extrême difficulté, votre pensée va à quelques privilégiés qui ont une résidence secondaire ou les moyens de louer un gîte, le moyen de travailler en télé-travail quatre semaines durant et les moyens de prendre le train à la dernière minute…Nous ne fréquentons pas les mêmes personnes ! Nous ne vivons pas dans le même pays, monsieur Le Président !
Enfin, j’ai bondi quand je vous ai entendu dire que ces décisions, vous les preniez dans l’intérêt de la santé des Français !
Depuis un an, vous vous souciez de la santé des français ?
En mentant sur bien des réalités cachées à tous : les masques qu’on a, qu’on n’a plus, qui ne servent à rien, qu’il faut porter à tout moment, même les enfants, les vaccins qui, dès le 1er janvier 2021, vont nous sauver de tout…désormais ce sera peut-être à la fin de l’été…
Depuis un an, vous vous souciez de la santé des français ?
En annonçant au début de la pandémie des créations de lits de réanimation à hauteur de 14 000 lits, alors que maintenant, un an après, vous en annoncez « un peu plus de » 10 000 quand il n’y en a toujours qu’à peine plus de 7000…tandis que la réorganisation des hôpitaux conduisant à la suppression de lits est toujours d’actualité…
Depuis un an, vous vous souciez de la santé des français ?
En faisant voter un budget de la santé pour 2021 en baisse de plusieurs centaines de millions d’euros …Les promesses du Ségur de la santé ne servent à peine qu’à rattraper la cure d’austérité imposée à l’Hôpital depuis près de 15 ans…
En continuant à supprimer des lits d’hôpitaux et en sanctionnant ceux qui osent le dire haut et fort comme à Nancy l’an dernier…
Depuis un an, vous vous souciez de la santé des français ?
En concentrant tous les moyens hospitaliers, déjà bien réduits durant ces quinze dernières années, sur le COVID ce qui conduit les ARS à déterminer quels sont les malades à traiter en priorité s’ils sont affectés d’autres pathologies, comme si le fait de devoir subir une intervention pour une prothèse de hanche, par exemple, quand on n’est plus capable de marcher, pouvait être différé indéfiniment sans dommage pour la personne concernée, et ce n’est qu’un exemple parmi des milliers tous plus dramatiques les uns que les autres… Tout cela à cause d’une gestion comptable de l’hôpital mise en œuvre depuis des années et dont Monsieur le Premier Ministre a été un des artisans…
On sait que le choix d’infantiliser les français, de les plonger dans une peur longuement entretenue a déjà détruit moralement un grand nombre de personnes, alors on pourrait s’attendre à un peu plus d’humilité, de compassion, de mesure dans la façon de s’adresser à tous les citoyens. Vous évoquez « certaines erreurs sur lesquelles on pourra revenir » mais on n’y revient pas. Figure de style.
Le peuple français fait preuve d’une résignation et d’une abnégation que vous auriez tort, Monsieur le Président, d’interpréter comme une adhésion inconditionnelle à votre personne et à votre façon de gérer cette crise sanitaire.
Car, il y a encore bien d’autres aspects dans votre gestion qui nourrissent le ressentiment et la colère…
Une citoyenne en colère, comme beaucoup d’autres, Nicole Hénault retraitée de l’EN, enseignante devenue principale de collège puis proviseure.