L’A.S.H. en butte à la gestion comptable
« Un élève de votre école attend encore son AESH? Les parents peuvent faire valoir son droit devant le tribunal administratif. Le « référé liberté » est une procédure gratuite qui peut se faire en ligne et sans avocat. L’adresse :
https://citoyens.telerecours.fr/#/authentication
A notre connaissance, c’est la seule méthode qui ait réussi à faire plier la direction académique jusqu’ici. »
A ce jour, près de 3300 élèves bénéficient d’une notification d’aide humaine dans notre département; 200 sont encore en attente de renouvellement; il faut y ajouter un certain nombre qui concerne des premières demandes non traitées par la MDPH, dont les délais n’ont pas été améliorés par la crise sanitaire : en ce début octobre, des parents reçoivent des réponses à des demandes déposées depuis janvier!
Les deux tiers des élèves notifiés ont été pourvus dans l’été. Quand on dit « pourvus », il faut s’entendre : ce n’est pas forcément à hauteur des besoins réels; mais en conformité avec la notification MDPH. Quand on sait que les MDPH ont été dévoyées de leur mission d’évaluation indépendante, pour se plier aux injonctions normalisatrices de la CNSA et aux contraintes budgétaires du Rectorat, on comprend mieux que ce qu’elles notifient désormais majoritairement en matière d’aide humaine, ce sont des AESH mutualisées, qui permettent sur le dos des élèves concernés d’autant plus d’économies budgétaires, que notre Direction académique (pour ne parler que d’elle) n’hésite pas à leur confier jusqu’à 7 élèves!!! L’intérêt de la mutualisation était discutable sur le fond, mais encore jouable avec 3 élèves par AESH; au-delà, c’est de l’apparat destiné à éviter l’action des parents devant le Tribunal administratif.
Soumises aux injonctions du secrétariat général, nos collègues coordonnatrices des AESH mettent les bouchées doubles pour pourvoir les notifications. A notre connaissance, pour l’instant, le budget suit. Mais on pourrait se trouver face à un problème de recrutement, si les conditions de travail des AESH continuent de se dégrader : pour un SMIC à temps partiel (et une grille de salaires qui vient juste d’être revalorisée à la marge), peut-on se permettre d’exiger d’elles et d’eux qu’ils/elles soient trimbalé·es d’une école à l’autre pour saupoudrer leur accompagnement auprès de tant d’élèves? quel sens donne-t-on à leur travail? Sans compter que les AESH qui complétaient leur revenu par une surveillance de cantine craignent d’être à tout moment empêché·es d’assurer ce double emploi qui améliorait leur ordinaire. Le PIAL est un bel écrin pour se gargariser de formules toutes faites comme « Ce n’est plus l’élève qui attend l’AESH mais l’AESH qui attend l’élève ». Mais un écrin ou une coquille d’autant plus vide que personne ne se bouscule pour le coordonner! Significatif également : le poste trompeusement dénommé « chargé de mission école inclusive », en réalité destiné à impulser les PIAL sur tout le département, a également peiné à trouver preneur.
Nous n’oublions pas non plus que la plupart du temps, les AESH en congé maladie, même de longue durée, ne sont pas remplacé·es au nom d’une loi hypocrite qui voudrait que la présence de l’AESH n’est pas une condition de la scolarité : certes, dans bien des cas, les adaptations pédagogiques permettent à nos élèves de continuer d’apprendre; mais ce déni de leur besoin est pernicieux; et carrément périlleux pour certains d’entre eux, qui se mettent en danger ou vivent un sentiment majeur d’insécurité qui nuit gravement au bénéfice de leur présence à l’école.
Dans la pratique, les personnels et les élèves paient le prix de cette gestion comptable, déconnectée des réalités vécues.
Et que dire de cette décision aberrante, d’abandonner le temps de cantine des AESH aux collectivités territoriales!? Qu’elles en aient la charge financière est logique en soi : mais l’intérêt des élèves aurait exigé que les personnels de l’E.N. assurent la continuité, quitte à ce que les collectivités défraient l’E.N. D’autres départements ont pris cette option. Dans les Alpes-Maritimes, encore une fois, l’intérêt des élèves passe au second plan.
« Oh, mais quand même : le poste d’inspecteur A.S.H. vient d’être dédoublé, signe de l’intérêt supérieur porté à la scolarisation des élèves handicapés dans notre département! » Tu parles, Charles. Un véritable intérêt pour l’A.S.H. ne se serait assurément pas traduit par une répartition exclusive du service de l’école inclusive : les établissements médico-sociaux d’un côté; les établissements scolaires de l’autre. Nous souhaitons la bienvenue à l’inspectrice A.S.H. nouvellement nommée, et ne doutons pas qu’elle saura éviter de rentrer dans le jeu pervers du diviser pour régner. Comme nous formulons le vœu que le nouveau Directeur académique saura mettre fin aux pratiques délétères qui ont abîmé le service public d’éducation dans les Alpes-Maritimes. Il aura fort à faire, mais nous saurons lui rappeler que l’intérêt des élèves et des personnels ne peut rester soumis aux impératifs comptables et aux jeux de pouvoir internes. La grève des AESH à laquelle la CGT appelle en intersyndicale le 19 octobre sera un premier test.