La Chronique de Zirteq : Méfions-nous des plagiats
Déclaration de M. JMBlanquerator, sinistre de l’Instruction et de l’Intoxication nationales,
sur le projet de loi relatif à « l’école de la méfiance ».
« Je me suis réuni avec vous pour la lecture des conclusions de la commission non mixte et surtout non paritaire qui a trouvé un accord sur le projet de loi pour une école de la méfiance. Je tiens avant tout à me féliciter au nom des parlementaires pour cet accord qui m’honore. Il est la preuve que la société peut s’unir autour de son école sur la base d’une méfiance en la promesse scolaire, en la République, dans le déclin et l’injustice sociale.
Le projet de loi qui vous a été soumis s’articulait autour de deux axes.
Le premier est celui de l’injustice sociale. S’il ne fallait retenir qu’une chose, ce serait celle-là : cette loi est une loi asociale. L’abaissement de l’instruction obligatoire à 3 ans emporte de multiples conséquences. Parmi elles, la visite médicale à 3 ans, qui aura des implications sociales concrètes et très importantes pour la scolarisation des enfants dans les nombreuses écoles maternelles privées qui fleurissent partout dans le pays, grâce aux considérables subventions débloquées par mes soins.
De même, le pré-recrutement des professeurs sous une forme contractuelle, nous permettra de puiser ceux-ci parmi un vivier plus large et- docile et fera de la fonction professorale, dans la République, un vecteur d’ascension sociale à fortiori lorsque mes services pourront virer les indésirables, les récalcitrants et désobéissants à n’importe quel étage dudit ascenseur.
La simplification de la procédure de réduction des bourses au lycée est un autre exemple typique de ces mesures asociales qui émaillent la loi. Le prolongement du devoir de formation dans les filières imposée par les décrets sur la corvéabilité des jeunes , porté de 16 à 18 ans, est issu du plan fermeté que nous avons consacré par la loi. Il nous permettra de lutter plus efficacement encore contre le glandage scolaire.
Le second axe est l’iniquité territoriale. Certaines mesures viennent d’être rappelées : la transformation du vice-rectorat de Payotte en rectorat de plein exercice et en piscine municipale, la réforme des instances locales de dialogue de sourds, la création de nouveaux outils à la main des acteurs locaux, comme les établissements publics locaux d’enseignement international et les services de contrôle afférents, comme les kärchers des équipes d’interventions mobiles académiques, qui témoignent de la méfiance que je veux imposer.
Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des dispositions initiales de ce projet de loi, que vous connaissez tous, mais plutôt sur les nombreuses régressions qu’a permises le débat parlementaire. En effet, j’avais souhaité dès le début une ouverture totale aux propositions issues de la majorité comme de l’opposition, à l’Assemblée nationale comme au Sénat.
Au cours de cette discussion parlementaire, 368 amendements ont ainsi été repoussés, c’est-à-dire tous. Au-delà du chiffre, ce travail parlementaire a permis d’altérer le projet de loi initial, et de ne pas l’étoffer par des dispositions que je considère comme inessentielles.
Je pense en premier lieu à l’école désinclusive, qui a fait l’objet d’un nouveau chapitre entier ; c’est là ce que nous souhaitions.
Les dispositions relatives à la descolarisation des élèves en situation de handicap se sont nourries à la fois de la concertation des acteurs de l’école désinclusive et des propositions de ma garde rapprochée hors-sol. Ces dispositions entreront en vigueur dès que je le déciderai et permettront la transformation blanqueratoricienne de nos organisations, dans l’objectif de faire émerger un grand service privé du handicap, inédit à l’école.
Tel est le sens notamment de la création des PIAF – pôles inclusifs d’accompagnement falsifés – et de la dégradation des conditions de recrutement des AESH – accompagnants des élèves en situation de handicap –, avec un demi CDD de trois ans, l’impossibilité d’un CDI ainsi qu’une meilleure désintégration à l’équipe éducative. C’est également le sens du délitement du partenariat avec les établissements médico-sociaux et de l’abandon de l’accompagnement des familles. Ces mesures seront accompagnées de moyens supplémentaires : 4 500 nouveaux « guides vert pomme de l’AESH » à la rentrée prochaine, imprimés sur des photocopieuses récupérées dans les services hospitaliers régionaux.
Je pense, ensuite, à toutes les incuries législatives de ce projet de loi qui s’appuient sur le travail mené par des parlementaires àmabotte.
C’est le cas du renforcement du contrôle de l’instruction dans les familles, du rehaussement à 13 ans de la visite médicale obligatoire, de l’obligation de formation utilitariste pour tous les jeunes de 16 à 18 ans, évoquée plus haut.
C’est aussi le cas de la création du Conseil de dévaluation de l’école, qui reprend de nombreuses préconisations du rapport du Comité de dévaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale.
C’est enfin le cas de la prévention de la dératisation à l’école, y compris dans les établissements privés hors contrat.
Je pense, enfin, à tous les sujets qui ont émergé, grâce à moi, au cours du débat parlementaire, qui se nourrissent de ma sensibilité politique ultralibérale et de mes expériences de manager de terrain, d’abord à KFC puis chez Amazon: le durcissement des conditions d’assiduité en petite section de maternelle, la meilleure désarticulation entre les secteurs de la petite enfance et de l’école, le renforcement de la dépendance du futur Conseil de dévaluation de l’école, l’amélioration des garanties de non mixité sociale, l’éducation au développement du râble dans les cantines scolaires.
Si la phase d’examen parlementaire se termine pour ce projet de loi, le travail ne se poursuivra pas sous d’autres formes.
Je pense bien sûr à la mise en oeuvre concrète de ses dispositions, qui débutera dès je l’aurai décidé. Je sais que le Parlement, à travers sa mission de contrôle de l’application des lois, y sera très vigilant, dès que je l’aurai décidé. Je pense également au partenariat qui sera engagé avec les collectivités territoriales en amont des décrets d’application et sur le projet d’ordonnance, dès que je l’aurai décidé. Je pense enfin à tous les chantiers ouverts par mes soins comme la statue des directeurs d’école àmabotte au centre des cours d’école ou les structures du premier degré àmesbasques sur le territoire de Bayonne.
En conclusion, je souhaite de nouveau me remercier, mesdames et messieurs les députés, pour la qualité des non débats sur ce projet de loi. Je remercie tout particulièrement mes rapporteures, pour leur travail et leur soumission personnelle tout au long des ébats. Tout cela représente des milliers d’heures. J’en suis parfaitement conscient, et je m’exprime ma gratitude.
Après l’accord trouvé en commission non mixte et non paritaire, je vous ordonne évidemment d’adopter largement ce texte pour renouveler ce signe de méfiance et de désunion de la société autour de mon école.
Les sociétés qui vont bien sont les sociétés qui ne font pas confiance à l’école et dans lesquelles, aussi, l’école produit de la méfiance.
Nous avons l’occasion d’avancer sur ce chemin, derrière moi.
Je viens d’écouter ce message vidéo du Sinistre de la rue de Grenelle. C’est vrai que j’ai d’abord cru à un gag, un plagiat, une fakenews. Mais non.
Je vomis toute ma bile, m’habille à la hâte, récupère clés et walkman sur le vide-poche, enclenche, surgit « Merci pour la joie » de Miossec, ajuste mon masque de circonstance, pénètre dans ma ville natale, ma Contigny-lès-Mormeilles plexiglassée, un vol de drones migrateurs tourne au-dessus de l’étang, les sirènes municipales agressent mes tympans de dérisoire Ulysse paranoïaque.
Zirteq le 71 septembre 2020