Les 4 de Melle
Sylvie Contini, Cécile Proust, Aladin Lévêque, Sandrine Martin
Caisse de solidarité : https://www.lepotcommun.fr/pot/n9i5n24r
Ce mercredi 4 novembre, Bénédicte Robert, rectrice de l’académie de Poitiers, aurait pu décider de mettre fin à l’affaire des « 4 de Melle » après pas moins de huit mois d’acharnement institutionnel à leur encontre. Alors même que la communauté éducative se recueille encore pour célébrer la mémoire de Samuel Paty, le ministère de l’Éducation Nationale n’hésite pas à attaquer et à sanctionner l’usage d’une liberté d’expression qu’il célèbre bien ironiquement dans les médias depuis plus de deux semaines. Jean-Michel Blanquer et ses plus proches collaborateurs sont aujourd’hui pris en flagrant délit d’hypocrisie !
Sylvie Contini est sanctionnée d’une mutation d’office, Cécile Proust est exclue de ses fonctions pour une durée de 15 jours (donc sans traitement), Aladin Lévêque écope d’un abaissement d’échelon et Sandrine Martin d’un blâme. Le rapport de l’enquête administrative préconisait de sanctionner les « 4 de Melle » parce qu’ils restaient dans leur « logique de combat de la réforme », c’est chose faite et les sanctions sont particulièrement lourdes ! Nous ne pouvons qu’être une nouvelle fois indignés face à cet acharnement répressif.
Cela fait à présent huit mois que l’affaire des 4 de Melle défraie la chronique et qu’elle suscite l’indignation, non pas seulement de la communauté éducative, mais de l’ensemble des secteurs professionnels. Pour rappel, trois d’entre eux avaient été suspendus à titre conservatoire pour s’être mobilisés contre les E3C et pour avoir dénoncé les faits graves par lesquels s’était compromise leur administration : pressions et intimidations hiérarchiques, violences physiques sur élèves, étages intégralement barricadés lors de la passation des épreuves de contrôle continu avec portes coupe-feu sanglées et sorties de secours condamnées, mise en danger d’élèves enfermés dans les salles d’examen et non évacués lorsque ces derniers étaient en proie à des malaises. L’administration s’est rendue coupable de l’intégralité de ces actes, et ce sont les enseignants qui se retrouvent incriminés ! Leur suspension de 4 mois, décidée en mars, avait été prolongée de 4 mois supplémentaires en juillet, décision inédite dans l’éducation nationale, et une quatrième collègue avait été ajoutée à la liste des réprimés, convoquée à un conseil de discipline alors qu’elle n’avait pas été suspendue.
L’affaire des 4 de Melle est devenue emblématique de l’acharnement répressif que subissent, dans l’éducation nationale, les personnels qui osent contester les réformes.
C’est pourquoi pas moins de 1500 personnes sont venues les soutenir devant le rectorat de Poitiers le 12 octobre, jour du premier conseil de discipline, sans compter les nombreux rassemblements qui ont eu lieu partout en France devant les rectorats et les DSDEN. C’est un soutien syndical d’une ampleur inédite qui a été apporté aux 4 de Melle et à tous les personnels victimes de répression : ce jour-là, étaient présents tous les représentants de l’IS nationale de l’Education (CGT, FO, FSU, Sud éducation), ceux de l’IS Fonction Publique, mais aussi les Confédérations Syndicales Solidaires, CGT, FSU et FO : du jamais vu dans un tel cas de répression !
Des réprimés d’autres secteurs professionnels, regroupés depuis mi-septembre dans un collectif interprofessionnel contre la répression sont, eux aussi, venus témoigner leur soutien aux enseignants Mellois : Julien du comité de soutien d’Anthony Smith, inspecteur du travail, Éric Bezou de la SNCF, Yann Gaudin de pôle emploi, Alexandre El Gamal de la RATP, Gaël Quirante de la Poste, Anissa Amini, aide-soignante en EHPAD, Boris Mollet, travailleur social.
La mobilisation a, sans conteste, contribué à faire reculer le rectorat de Poitiers. Fragilisé par son ampleur inédite mais aussi par les nombreuses irrégularités et contradictions soulevées lors des conseils de discipline, le rectorat s’est parfois vu contraint de modifier, voire d’abandonner, des chefs d’accusation en cours de séance !
Lors du premier conseil de discipline, à savoir celui de Sylvie Contini, l’administration, forte de son arrogance, n’a pas hésité à louer le sérieux de l’enquête administrative et a nié, toute responsabilité concernant les décisions ayant mis en danger la sécurité des élèves au lycée Joseph Desfontaines de Melle lors de la passation des épreuves d’E3C.
Lors des conseils de discipline suivants, cette même administration a fini par se désolidariser officiellement des méthodes de l’enquête administrative dont elle faisait l’éloge en début de semaine, reconnaissant explicitement que cette dernière n’a pas pu permettre l’objectivation des faits reprochés aux enseignants. Elle a même fini par reconnaître et condamner fermement les débordements dont certains de ses représentants se sont rendus coupables lors des passations d’épreuves.
Sans cesse mis en difficulté, le rectorat de Poitiers a dû se résoudre à proposer des sanctions de plus en plus basses sur l’échelle des sanctions disciplinaires au fur et à mesure de la semaine, ce qui explique leur gradation dans les décisions finales. La différence dans les sanctions apportées ne fait que symboliser le recul progressif de l’administration ; en effet, cette différenciation n’est en rien justifiable puisque les dossiers des quatre enseignants sont, sauf différences très mineures, identiques. Ici, seul l’ordre de passage justifie l’ampleur de la sanction ! Plaisante justice que celle que le hasard et l’aveuglement bornent…
Après une semaine de conseils de discipline et pas moins de 32h de séances cumulées (chacun des conseils de discipline ayant duré plus de 7 heures !), aucune proposition de sanction de la rectrice de l’académie de Poitiers n’obtient d’avis majoritaire. Mieux encore, pour Aladin Lévêque, c’est l’avis d’absence de sanction qui obtient la majorité. Le désaveu est de taille pour Mme la Rectrice de l’académie de Poitiers quand on sait à quel point ces procédures sont normalement gagnées d’avance pour l’administration qui y est à la fois enquêtrice, accusatrice et juge.
Désavouée par ses propres procédures, Bénédicte Robert n’en a pas moins décidé de passer en force et d’appliquer ces sanctions qu’aucun des conseils de discipline n’a validé !
La communauté éducative ne peut tolérer un tel abus de pouvoir ! La mobilisation a déjà fortement contribué à faire reculer le rectorat de Poitiers : il faut aujourd’hui la poursuivre pour qu’aucune sanction ne soit prise contre nos collègues.
Nous demandons au ministre de l’Éducation Nationale ainsi qu’à la rectrice de l’académie de Poitiers de bien vouloir entendre et reconnaître l’unanimité du soutien apporté aux 4 enseignants de Melle en abandonnant toute sanction contre eux. Nous exigeons aussi d’avoir la garantie que plus jamais ce ministère ne remettra en question les droits syndicaux et les libertés démocratiques.
Les 4 de Melle n’en resteront pas là et useront de tous les recours qui leur sont offerts pour dénoncer ces méthodes et faire annuler ces sanctions. Et nous les soutiendrons dans toutes les démarches entreprises ! Vous pouvez dès à présent leur apporter un soutien financier en participant à la caisse de solidarité : https://www.lepotcommun.fr/pot/n9i5n24r